Il est 1h43 et je ne dors toujours pas.
ce que c’était beau. ce que c’était bon. grand. la foule était compacte, bienveillante, presque douce. les larmes me montaient à chaque vague d’applaudissements. il y avait tellement de monde, que je ne suis jamais arrivée à République! quelle joie et quelle fierté. on était tous ensemble, ensemble. c’était massif, mais surtout c’était… possible!
les jours précédents ont été abominables. ma fille me faisait des câlins et des dessins “plain de bisous” pour m’apaiser (faut que je l’aide en orthographe semblerait-il). je ne pouvais pas tenir de conversation. autour de moi, on avait la nausée, on ne pouvait rien avaler, on ne dormait pas bien, on se réveillait avec les yeux anormalement gonflés. les corps parlent. pour ma part j’ai des bleus partout de tomber sans cesse, de me cogner. la perte de repères sans doute, le vertige : en France, des Français tuent d’autres Français parce qu’ils dessinent, sont juifs ou flics? ah non, ça passe pas. comme vous, j’ai été abasourdie d’entendre des récits d’enfants “ils auraient pû n’en tuer qu’un, douze, c’est trop”. comme une lame qui m’aurait fendue en deux.
nous avons marché hier, et ce que la France était belle comme ça. nous étions là pour pleurer nos morts ensemble, pour prendre soin de nous dans cette foule incroyable, pour dire aux autres, pour nous dire qu’on n’avait pas peur. nous sommes debout, nous avons des valeurs. nous sortons les défendre. pour construire aussi un avenir, je me suis dit qu’il fallait continuer. je me suis dit que je portais aussi une responsabilité. que toutes ces années, “jusque là tout va bien” comme ils disaient dans la Haine, toutes ces années, je n’ai pas voulu voir les dangers qui aujourd’hui nous pètent à la gueule. que je dois faire mon examen de conscience. j’ai regardé, comme vous tous énormément de vidéos, dont voici les plus marquantes.
> Robert Badinter sur France Inter
> Philippe Val qui vient de perdre tous ses amis
> Brigitte Gabriel sur Benghazi (sa réponse à partir de 4’07)
tout ça me fait réfléchir. je ne sais encore quoi penser mais ça avance.
et puis, je suis fille d’immigrés, la France a donné une chance à ma famille, j’ai bénéficié d’une scolarité, je n’ai pas connu la guerre, j’ai une police qui me protège. il faut que je rende. ces événements malheureux m’ont fait prendre conscience de mon manque de conscience justement. J’y ai compris le sens des mots liberté, égalité, mais aussi fraternité. et je vais chercher activement une manière de me rendre utile pour les autres, pour ceux qui en ont besoin et pour mon pays. ça va passer par des choses simples, du soutien scolaire par exemple, ou réaliser des vidéos avec les gamins, j’en sais rien, mais je dois faire quelque chose. chacun peut être utile.
je pensais pas dire ça un jour, mais : Vive la République!