Eh bah voilà, je vais me présenter un peu. C’est quoi mon parcours, mon boulot, tout ça. En même temps… ColorDesigner? … Qué?!!! C’est quoi ça? Je comprends que cela puisse soulever des interrogations.
Alors voilà, j’ai un parcours en plein de temps. Disons d’abord qu’il est double. j’ai commencé avec un bon profil de première de la classe : BAC à l’époque C, Prépa HEC, puis une école de commerce, à l’ESSEC. Je donne des cours de maths pour payer mes études et à la sortie paf : l’Oréal m’embauche comme Chef de Produits sur les collections de maquillage. C’est là que je rencontre Fred Farrugia. C’est là que je rencontre … les couleurs. Enfin, c’est plus complexe que ça mais ça je vous en parlerai une autre fois… quand on se connaîtra mieux :p
Lancer les collections avec lui, c’était génial. J’étais une sorte d’électron libre dans la boîte. Beaucoup de liberté. C’était tellement précieux. J’avais moi même été recrutée à la marque quelques années plus tôt en achetant une palette trio de sa collection ROUGE. Travailler avec Fred, c’était travailler avec l’un des plus grands. Un coloriste hors pair, gentil et simple. Il avait une manière de raconter des histoires en couleurs très fluide, féminine, enthousiaste. C’est avec lui que j’ai commencé à m’intéresser aux couleurs et puis aussi à écrire des histoires dessus. Les collections faisaient un carton. Nous étions premiers partout. A Honk Kong, les gens faisaient des queues de plusieurs dizaines de mètres pour acheter la collection OZ. Les Juicy Tubes, les Color Focus, les crayons Freckles… pfff c’était toute une époque!
Et puis, ce qu’il y avait de bien aussi chez l’Oréal c’était les formations. Un jour, j’entre dans les locaux de l’IFM pour une formation sur la couleur. Je me rappelle, avec un prof des Arts Déco. Denis Perus. Ce fut un petit choc. Une très grande émotion. Je me souviendrai toujours qu’en sortant je voyais tout en couleurs. plus de table, de mur, d’escaliers. que des tâches de couleurs “savamment organisées” comme il disait. C’était tellement beau.
Côté boulot, après 3 années sur les collections, je suis repassée dans le “coeur de métier”, sur un post marketing toujours, mais sur les rouges à lèvres et vernis. Il y avait toujours cette partie gestion de projets (=coordonner les labos, le pack, la pub etc pour que le produit sorte en temps, en heure au bon prix et si possible, pas trop moche) mais c’était beaucoup plus cadré. Les projets étaient top, l’équipe, la marque aussi. mais moi… moi, je n’étais pas heureuse. Et puis ce truc sur les couleurs ça me trottait vraiment dans la tête.
Alors, j’ai recontactée Denis, qui a cru en moi et m’a proposé de suivre des cours aux Arts Déco. Ils avaient à l’époque ce qu’ils appellent des formations continues. Je devais convaincre un prof pour devenir mon tuteur et alors tous les cours des étudiants m’étaient ouverts, à la carte. Je n’avais évidemment aucun dossier créatif à proposer mais j’ai envoyé une lettre de motivation à la chef du département couleurs, Martine Duris (la mère de Romain :p). Bingo.
La deuxième partie du parcours peut commencer. Je veux dire, après avoir pris des chemins que l’on décrit parfois comme tout tracés, je me suis lancée sans savoir ce que j’allais faire. Je sais pas comment vous dire, mais ça me faisait un bien fou de ne pas savoir. De découvrir quelque chose qui me plaisait profondément, en faisant confiance sur ce qui allait se passer. Sur les rencontres et les projets que ce virage allait me permettre. Certains m’ont dit “t’as eu du courage quand même”, mais franchement, je me suis jamais dit que je bravais un quelconque danger. C’était comme ça. C’est tout 😀
Pendant un an et demi, j’ai suivi tous les cours de couleurs aux Arts Déco, mais aussi des cours de beaux arts (peinture, sculpture, dessin) et d’arts appliqués (graphisme, textile, sérigraphie… ah la sérigraphie!). Je n’avais pas de niveau et il n’y avait pas de diplôme au bout. l’enjeu c’était juste de vivre, de “vivre quelque chose”. Le rêve! J’étais en jogging toute la journée, avec les mains de toutes les couleurs. Le kiffe!

Hahaha, ça me fait bien plaisir de revoir mes travaux d’étudiantes. Mes projets étaient super bien reçus et à la sortie, Martine m’a proposée de l’assister pour des projets d’architecture. La couleur en architecture, c’est pas vraiment de la déco (j’eus été bien mal) c’est plutôt la finition du volume. on a fait une crèche, tous les entrepôts de la poste (c’est énooorme un entrepôt de la poste), un hôpital etc… c’était génial. Et puis, je travaillais chez elle, alors parfois on avait droit à un petit coup de fil du fiston en haut parleur “Viens Philippe, c’est Romain!” “bah voilà, on est à NYC. Je suis avec Jacques (Audiard) là. on vient de faire la projection. On a reçu un super accueil. Tout se passe bien…”

Un projet sur le fou rire… déjà!
Et puis Armani m’a appelée. Pas Giorgio hein, l’équipe parfum. J’ai eu beaucoup de chance parce que je n’aurais jamais eu le courage d’aller démarcher des boîtes sans aucun projet à mon actif. On m’a fait confiance. Beaucoup de chance. Ils travaillaient au lancement d’Armani Code et ne trouvaient pas la couleur du parfum. Des dizaines d’essais infructueux. Ils m’ont briefé sur plusieurs pistes, auxquelles j’ai répondu. Mais en plus, j’y ai ajouté un Bleu. Vous savez comme j’aime le bleu… c’est une couleur avec laquelle je suis à l’aise. On a bossé avec les maquettiste et on a proposé un bleu fort, et profond. Il se dégradait à merveille dans le noir… Et c’est passé. Donc voilà, Armani Code a été mon premier parfum.
J’en ai eu un deuxième, puis un troisième. L’équipe de Thierry Mugler m’a alors contactée pour lancer le maquillage. J’ai alors travaillé sur des textures, des teintes etc… mon métier était lancé. Là où vraiment j’ai de la chance c’est que d’habitude, on appelle des free lance pour ce qu’ils savent déjà faire. Mais un jour, l’équipe me dit : “tu voudrais pas nous écrire des textes, on te sent bien là dessus”. C’est comme ça que j’ai commencé à écrire. Aussi.
Ca fait donc maintenant 7 ans que je travaille à lancer des couleurs et des concepts de nouveaux produits pour le parfum, le maquillage et même aussi le soin. Et ça me plait .. beaucoup!
Donc voilà, mon parcours, mon cheminement. Si vous voulez, je vous raconterai comment je travaille, parce que finalement, je m’en rends compte, qu’après ce très long post, mon métier n’en est pas moins abstrait si? Je veux dire, vous savez maintetant comment j’en suis arrivée là mais le “là” en question, vous ne savez pas encore ce que c’est si? dîtes moi. Je vous embrasse.